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S. Kolupaila. Le Niémen. Introduction

Introduction

Le Niémen est un des plus gros des fleuves qui débouchent dans la mer Baltique. Il vient, de la Russie Blanche, traverse des territoires polonais, lithuaniens et prussiens et aboutit à la baie de Courlande (en lithuanien Kursiu Marios, en allemand Kurisches Haff) (fig. 1). Il draine 98.102 km2 bassin presque égal à celui du Rhône et supérieur à ceux de la Seine ou de la Garonne.
L'histoire du Niémen, comme voie navigable, comporte des faits légendaires et historiques, évoque les invasions des Normands dans la région du Dniepr, l'expédition du chevalier romain Palémon, etc.. Le Niémen était déjà connu des Romains qui l'appelaient Ghiren,uis (latinisation du nom du Ghronos qui devint Saturne).
Dans les temps préhistoriques, le nom du Niémen a dû avoir une signification mythologique. Là où maintenant se trouve le hameau Nemunaitis, il y a eu des sanctuaires en l'honneur du dieu Niémen. Gomme le Nil, fleuve nourricier de l'Egypte, était adoré par les anciens Egyptiens, de même le Niémen, artère principale de communications, front de défense, et « cœur de la terre lithuanienne », était honoré par les Lithuaniens et chanté par leurs poètes,.
Les Lithuaniens appellent le Niémen Nemunas (prononcer Niamounass), les Russes le nommaient Niémen et Nimien (à présent Nieman), les Polonais Niémen', les Ruthéniens Nioman;

Reseau hydrographique du Niémen

Fig.1. - Réseau hydrographique du Niémen


les Allemands en ont fait Le Memel dans son tronçon inférieur, mais pour son cours su/périeur conservent le nom polonais qu'ils écrivent Njemen.
Les anciens cartographes ne comprirent pas que ces deuix dernières dénominations s'appliquaient à un seul fleuve, et cette méprise leur fit inventer un lac imaginaire : Salmatia Lago, entre Gardinas (Grodno) et Pinsk, d'où aurait émané le « Memel flumen». Au-dessus de Gardinas, ce dernier aurait reçu un grand affluent nommié Niémen, issu d'un autre lac également imaginaire, le Grono Lago. C'est ainsi que le réseau fluvial est dessiné sur la carte de Mercator « Lituania », éditée en 1628 à Amsterdam (fig. 2).


Réseau hydrographique du Niémen d'après la carte de Gérard Mercator (1623)

Fig.2. - Réseau hydrographique du Niémen d'après la carte de Gérard Mercator (1623)


D'autres cours d'eau portent un nom semblable à celui de notre fleuve. Au Nord de la Lithuanie, il y a le Nemunelés, c'est-à-dire le petit Niémen, qui réuni à la Musa forme près de Bauska, en Lettonie, la Bielupé (la Gourlandaise). Les Allemands le nomment aussi Memel.
Dans le delta du fleuve, au Sud, une branche morte détachée du bras méridional, la Gilija, rejoint un Nemunynas, appelé par les Allemands Nemonienstrom, par où gagnent la mer les riviérettes Laukné et Timbra. Peut-être ce chenal a-t-il écoulé autrefois une quantité d'eau considérable. La rivière Nemencia, affluent de la Néris (Vilija) porte un nom similaire.
Quelques sources historiques très anciennes mentionnent le Niémen comme une grande voie navigable utilisée pour les expéditions commerciales et militaires. Dans les Chroniques et les Annales, on évoque les voyages sur le Niémen des grandsducs et des rois, la construction ou la destruction de châteaux au voisinage, etc.. Mais les faits historiques certains concernant le Niémen ne remontent pas au delà du xvr siècle. Parmi les épisodes célèbres, citons la traversée du fleuve par le roi de Suède Charles XII, près de JaLoudok, puis par Napoléon près de Kaunas et par le maréchal Davout près do Draveliskis en 1812. En souvenir de cet événement, le coteau qui domine l'embou chure la Jesia a conservé le nom de colline de Napoléon. A de Draveliskis, quelques terrassements faits par les Français ont subsisté.
Navigation et rapides. - Le fleuve, par son tracé et par son régime, durant presque les trois quarts de l'année, est une excel lente voie navigable. Mais il comporte, surtout dans son cours moyen, quelques passages difficiles pour les bateaiux, où des bancs de sable, de rochers ou de graviers créent des rapides, d'ailleurs moins dangereux que ceux du Dniepr et de la Daugawa (Duna occidentale). Cependant il s'y est déjà perdu des bateaux et plus souvent encore des radeaux ont été disloqués.



Depuis très longtemps, chacun des passages dangereux a été bapiisé par les Ruthéniens qui les abordaient de l'amont avec leurs radeaux. Les rapides les plus redoutables au-dessus de Kaunas sont nommés Bichi et Bichcniala, ou plus correctement Bissy et Bisseniala, c'est-à-dire : diables et diablotins. En lithuanienils s'appellent Pont du diable et Bain du diable1 (Velnio tiltas et Velnio pirtis).
Dans le monde des bateliers occupés au flottage et des pêcheurs, beaucoup de proverbes et de légendes sont associés à ces noms. D'autre part, en comparant la navigation actuelle à celle d'autrefois, on acquiert l'impression que celle du temps passé rencontrait des obstacles plus nombreux et plus difficiles à surmonter que maintenant. Peut-être, au cours du dernier siè cle, l'érosion du fleuve a-t-elle accompli une régularisation eff icace du profil en long, au droit de ces rapides, somme toute peu accentués. Mais ceci n'est qu'une opinion quelque peu théorique.
Recherches scientifiques et travaux effectués sur le fleuve. - Le premier renseignement historique sur la régularisation du Niémen date du xvr siècle. Sous le roi Sigismond Auguste, par l'initiative de son vassal Nicolas Tarlo, un grand nombre de roches dangereuses ont été enlevées du lit. Ce travail fut consi déré en son temps comme considérable et utile, car les riverains reconnaissants ont érigé sur les bords du fleuve un monument à Tarlo, tandis que le jeune poète silésien Adam Schroeter chantait cette œuvre bienfaisante en vers latins (1554).
D'autres grands travaux ont été exécutés sous le dernier roi de Pologne, Stanislas Poniatowski. Sur l'initiative de son ministre, Antoine Tyzenhauz, il convoqua en 1775 une commission spéciale sous la direction de François Nairwojsz (Norvaisia), professeur de mathématiques, pour l'exploration et la régularisation du Niémen, entre Gardinas (Grodno) et Kaunas. Pendant trois ans, la comimission travailla avec succès en employant des plongeurs recrutés en Angleterre. On retira du Niémen une quantité de rochers. On projetait d'établir avec ceux-ci une pyramide pour immortaliser les travaux, comme pour ceux du xvie siècle. Le roi lui-même composa en vers latins l'inscription commemorative. Les guerres empêchèrent l'érection du monument.
De 1795 à 1815, la frontière entre la Russie et la Prusse suivait le Niémen, de Gardinas à Smalininkai. En 1803, les deux pays conclurent un accord en vue d'investigations nouvelles et de travaux d'aménagement sur ce bief du Niémen. Les premières recherches sérieuses de ce genre eurent donc lieu de 1803 à 1806. Du côté allemand, l'hydiraulicien célèbre J. A. Eytelwein présida cette commission; du côté russe, elle était dirigée par le général Falconi et par l'ingénieur Théodore Narbut, auteur d'une Histoire de la nation lithuanienne.
La commission effectua des sondages et dès relevés de profil en travers; en 1803, elle fit implanter entre Gardinas et Smalininkai les 13 premières échelles pour la mesure des hauteurs d'eau,. Sur le Niémen inférieur, les premiers limnimètres furent installés en 1811 à Smalininkai, Tilsit et Sellen. Mais les guerres de Napoléon empêchèrent d'exécuter le plan d'aménagement préparé par la commission. D'autres projets plusieurs fois renouvelés au xixe siècle n'aboutirent pas, ou ne reçurent qu'une exécution partielle.
En 1824-1831, les Russes construisirent le canal d'Augustowo pour joindre les réseaux du Niémen et de la Vistule en évitant la Prusse orientale à laquelle appartenaient les embouchures de ces fleuves. Une seconde étape dans l'établissement d'un débou ché uniquement russe vers la mer, à savoir un canal du Niémen à la Venta, par la Dubysa, ne fut pas entièrement réalisée, mal gré les travaux effectués en 1824-1831, et alors abandonnés après la révolte de la Pologne et de la Lithuanie contre les Russes.
En 1840, le premier bateau à vapeur (alors nommé pyroscaphe) parut sur le Niémen. A partir de 1855, on organisa la navigation régulière au delà de Kaunas sur le cours inférieur. Celui-ci fut régularisé de façon rationnelle par les Allemands, en 1875-1892, au moyen de digues latérales, en aval de Smalininkai.
En 1877, un certain nombre d'échelles avaient été établies par des offices russes, le long du Niémen supérieur et moyen, et de la Néris (Vilija). Elles foractionnenent jusqu'à 1915, moment où les armées allemandes oiocuipèrent la Lithuanie.
De 1893 à 1897, une expédition scientifique dirigée par l'ingénieur V. Kholchevnikov exécuta d'es travaux géodéslques entre Stolpce et Smalininkai et jaugea le débit à 35 profils. Par rap port aux études faites sur les autres fleuves russes, ces travaux révélaient un grand progrès.
En 1909, la Commission d'exploration des Forces hydrauliques de la Russie, dirigée par le professeur G. Mertching, entreprit une étude d'aménagement dans le méandre remarquable entre Nemaniiunai et Birstonas, qui présente des possibilités intéres santes pour l'utilisation de l'énergie hydraulique. Mais le projet ne fut pas suivi d'exécution.
Dès 1919, la Lithuanie indépendante reprit les observations hydrométriques supprimées pendant la guerre. Depuis 1923 son Bureau hydroimétriqué2 explore systématiquement les cours d'eau du pays. Il dirige et contrôle les relevés à 100 limnimètres, de nombreux jaugeages, et des déterminations de profils en long. Le calibrage du Niémen par digues latérales est en cours entre Kaunas et Smalininkai. Le cours supérieur à l'amont de Druskininkai relève du Bureau central hydrographique polonais. Le bas Niémen est observé et administré à la fois par les Allemands et par les Lithuaniens.
Mais comme fleuve national, le Niémen présente un intérêt tout spécial pour ces derniers.


1Les pentes locales atteignent 71 cent. par km. au rapide Guoga, 53,0 cent. par km. au rapide Bicheniata, 50 cent. par km. au rapide Bichi.

2Le fondateur de cet office fut l'auteur du présent mémoire. (N. D. I. R.)

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